29 janvier 2024

Hausse des taux d'intérêt : quels impacts sur la dette publique ?

En 2011, les pays européens dits « frugaux » avaient été mis sous la pression des marchés, entrainant une crise des dettes publiques. Le confinement lors de l’épidémie du Covid a engendré le « quoi qui l’en coûte » et propulsé les déficits publics vers des zones éloignées de l’orthodoxie financière. 

La hausse des taux, initiée en 2022 par les banques centrales, ouvre alors de nouveaux enjeux pour la soutenabilité des dettes publiques.

Tout d’abord, qu’est-ce que la dette publique et comment évolue-t-elle ?

La dette publique correspond à l'ensemble des engagements financiers pris sous forme d'emprunts par l'État, les collectivités publiques et les organismes qui en dépendent directement. 

La dette publique évolue constamment au rythme des remboursements d'emprunts effectués par l'État et les administrations publiques et des nouveaux emprunts qu'ils contractent pour financer leurs déficits, impactant ainsi le solde budgétaire.

  1. Une partie des déficits publics provient du déséquilibre entre les dépenses réalisées par les États et les recettes provenant des impôts. Lorsque les finances publiques sont en déficit, cela accroît la dette.
  2. L’autre partie provient de la charge financière liée au paiement des intérêts sur la dette.

À noter que les dettes publiques dans les pays développés se sont envolées sur les dernières années. Aux États-Unis et en France, le déficit public s’élève à 5,8 % et 4,8 % des PIB respectifs et vient s’ajouter à la dette déjà existante.

Dans les économies avancées, la dette globale représentait, en 2021, 110 % de la richesse créée, c’est-à-dire du PIB, contre 70 % il y a 20 ans. Au Japon, en France et en Allemagne, ce même ratio s’élève respectivement à 264 %, 112 % et 66 %.

Mais alors, comment les États financent leurs dettes ?

Au fil des années, les États ont financé ces dettes sur les marchés obligataires avec des niveaux de taux proches de zéro.

Cette période de taux bas a facilité le développement des dettes sans peser outre mesure sur les finances publiques. Selon le Fonds Monétaire International (FMI), la charge d’intérêt des dettes publiques n’a cessé de diminuer au cours des deux dernières décennies, quand bien même les dettes publiques n’ont cessé de progresser.

En 2021, la charge financière représentait 1,2 % du PIB pour les économies avancées, soit un taux d’intérêt apparent autour de 1,1 %.

Toutefois, la hausse des taux d’intérêt intervenue en 2022 est venue impacter et détériorer ce chiffre.

Prenons pour exemple le cas de la France, dont la maturité moyenne de la dette est de 8,5 ans, cela signifie qu’en moyenne le Trésor Public doit refinancer chaque année environ 12 % du stock de sa dette. En y ajoutant le déficit public annuel, cela représente plus de 17 % du PIB qui doit être emprunté chaque année sur les marchés financiers.  

Aujourd’hui, les taux d’intérêt auxquels l’État français peut se financer s’établissent autour de 2,8 %. S’ils se maintiennent à ces niveaux, la charge de la dette pourrait augmenter de 0,30 points par an. Cette évolution deviendrait vite contraignante pour les finances publiques (dégradation de la notation de la France, sanctions européennes…), obligeant l’État à mettre en œuvre une politique de rigueur budgétaire.

Quel impact cela représente-t-il sur le budget des États ? 

Pour apprécier la soutenabilité de la dette publique, le niveau de la dette ne doit pas être considéré en absolu (c’est-à-dire en Euro) mais en pourcentage du PIB. En effet, lorsque le PIB augmente sous l’effet de l’inflation et de la croissance économique, cela permet de réduire, voire annuler, les effets de la hausse de la dette.

En définitive, l’évolution de la dette publique (en % du PIB) dépend, d’une part de l’écart entre le taux d’intérêt apparent et le taux de croissance du PIB en valeur et, d’autre part, du solde des dépenses de fonctionnement et d’investissement des administrations publiques.

La hausse des taux récente va mécaniquement et progressivement devenir plus contraignante pour les finances publiques. La direction du Trésor Public estime que la charge de la dette française (39 milliards d’euros en 2023) devrait doubler d’ici à 5 ans…

Sur les trois dernières années, si la hausse de l’inflation et la croissance de l’activité ont permis de réduire le ratio dette / PIB, le ralentissement économique et la baisse de l’inflation des années à venir impliqueront une rigueur budgétaire dans les dépenses publiques, pour permettre une stabilisation de ce ratio.

François Jubin

Directeur Général Zenith AM

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