31 mars 2023

Familles recomposées : maintenir l’égalité entre enfants

La situation

Monsieur et Madame Aubert sont en couple depuis 15 ans. Ils ont deux enfants Amélie et Arnaud et Monsieur Aubert a un enfant issu d’une première union, Antoine. 

Il décède en premier, laissant sa nouvelle femme et ses enfants se partager la succession, et ce, sans aucune anticipation. 

Au décès de sa femme, le quart en pleine propriété dont a hérité Madame Aubert en l’absence de dispositions particulières, intègre pleinement l’actif successoral. Ainsi, Antoine, issu d’une première union de Monsieur Aubert, n’aura aucun droit sur les biens transmis alors que le patrimoine « appartenait » au premier défunt. Il y a donc un transfert de patrimoine de la branche familiale de Monsieur vers la branche familiale de Madame.

Dans ce contexte de famille recomposée, quelles sont les stratégies à envisager pour assurer une certaine équité entre les enfants ?

Réaliser une libéralité en faveur du conjoint survivant

La libéralité porte sur l’usufruit de la succession pour respecter la dévolution par branche familiale. Cette solution permet de transmettre au conjoint sans priver les enfants. Le conjoint survivant perçoit alors des revenus en tant qu’usufruitier. Les biens reviendront à l’enfant du premier lit, famille d’origine. Autre avantage, la reconstitution de la pleine propriété au profit d’Antoine est en franchise de droits de succession.

Attention néanmoins, cette solution comporte des inconvénients. Il existe ainsi un risque que les enfants ne recueillent jamais le patrimoine d’origine en pleine propriété si le conjoint survivant et les enfants sont de la même génération. D’autre part, il n’y a pas forcément de biens susceptibles de générer des revenus dans la succession. Enfin, l’entente entre usufruitiers et nus-propriétaires est indispensable concernant les actes de disposition.

À savoir : le recours au testament est obligatoire pour priver le conjoint survivant d’un droit légal. Il est possible d’imposer au conjoint l’option pour l’usufruit en le privant des autres options. Cette restriction ne peut être prévue que par testament et non par une donation au dernier vivant.

Ce type de libéralités permet d’éviter des déséquilibres entre les enfants tout en assurant la protection du conjoint survivant. Pour cela, une double transmission est réalisée. Si l’on reprend notre exemple, la transmission a lieu dans un premier temps au légataire de premier rang (le conjoint survivant), à savoir Madame Aubert. C’est la fiscalité afférente qui s’applique. Dans un second temps, la transmission se fait au légataire de second rang. Dans notre exemple, Antoine, l’enfant de monsieur Aubert né d’une précédente union.

Concrètement, Madame Aubert reçoit les biens à charge de les transmettre à Antoine en intégralité (libéralité graduelle) ou ce qu’il en reste (libéralité résiduelle). Antoine tient ses droits de Monsieur (le testateur) comme si le bien n’avait jamais transité par le patrimoine de Madame (le légataire). Au niveau fiscal, les droits de mutation à acquitter sont calculés en fonction du lien de parenté soit selon le barème des droits de donation et abattements en ligne directe, après déduction des droits déjà acquittés par le premier gratifié.

Cette stratégie permet d’assurer une transmission équitable entre Antoine (grâce au legs graduel ou résiduel) et Amélie et Arnaud, les enfants communs (grâce à la dévolution successorale légale).

Rédiger un testament-partage

Le testament-partage est une disposition du défunt qui :

  • Prévoit la distribution et le partage des biens au décès,
  • Peut porter sur l’ensemble des biens ou seulement sur une partie,
  • Ne peut s’appliquer que sur des biens communs et ne peut pas être conjonctif.

Son intérêt est d’imposer aux héritiers le partage choisi. Soit les héritiers acceptent la succession, soit ils y renoncent ce qui permet d’éviter les contestations. Cette solution permet d’éviter le dessaisissement immédiat contrairement à la donation-partage. Le testament-partage est révocable et modifiable à tout moment. Autre avantage, il peut porter sur des biens présents ou futurs.

Attention néanmoins, cette solution a également des inconvénients. Elle ne permet pas de transmettre des biens communs. Le droit de partage est de 2,5 %. Enfin, si les enfants renoncent au testament-partage, ils renoncent à la succession.

Procéder à une adoption simple pour gratifier l’enfant de son conjoint

Cette stratégie permet à Antoine d’hériter du patrimoine de Madame, au même titre que les enfants communs. L’adoption simple permet de conférer à l’enfant adopté des droits dans la succession de l’adoptant. Ainsi, l’enfant adopté bénéficie des mêmes droits successoraux que les enfants biologiques. En revanche, il n’acquiert pas la qualité d’héritier réservataire à l’égard de l’adoptant. L’enfant adopté se voit également appliquer la fiscalité afférente aux transmissions en ligne directe (après abattement de 100 000 €). Par ailleurs, il conserve ses droits héréditaires dans sa famille de sang.

À savoir : le recours à la procédure d’adoption doit avant tout être motivé par des considérations personnelles et familiales. Pour rappel, l’adoption ne peut concerner que l’enfant du conjoint. En effet, il n’est pas possible de procéder à l’adoption de l’enfant de son concubin ou partenaire pacsé.

Personnaliser la clause bénéficiaire de son contrat d’assurance-vie

L’assurance-vie est un outil permettant de rétablir l’équilibre entre les enfants communs et ceux d’une précédente union. En effet, la transmission du capital via l’assurance-vie est plus souple dans la mesure où le contrat est hors succession ce qui exclut les règles applicables en matière de réserve héréditaire (sauf cas des primes manifestement exagérées).

Grâce à la liberté de rédaction de la clause bénéficiaire, il est possible d’organiser la répartition des capitaux transmis en cas de décès en dehors des règles de la dévolution successorale légale. Par ailleurs, tous les enfants, communs ou non, bénéficient de la même fiscalité avantageuse de l’assurance vie s’agissant des primes versées avant 70 ans. En effet, pour rappel, les capitaux décès sont taxés, après abattement de 152 500 euros par bénéficiaire, au taux de 20 % jusqu’à 700 000 euros, et au-delà, au taux de 31,25 %.

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