La Réserve fédérale américaine a bien offert la pause dans le processus de remontée des taux directeurs que nombre d’investisseurs appelaient de leurs vœux. Pourtant, la réaction des principaux indices traduit une déception certaine… Pourquoi ? Cette pause était largement anticipée, et la « surprise » était finalement ailleurs.
En révisant à la hausse ses prévisions de taux directeurs à moyen et long terme (ainsi que ses prévisions de croissance), les banquiers centraux ont engendré une forte remontée des taux souverains (et du dollar). Le 10 ans américain tutoie désormais le seuil des 4,40%... soit un nouveau plus haut depuis près de 15 ans ! Le taux réel (c’est-à-dire le taux retraité de l’inflation) s’établit désormais autour des 2%...
Au-delà de cet ajustement des perspectives de croissance et d’inflation, le discours tenu par Jerome Powell a une tonalité « hawkish »*… Si le pic des taux directeurs est toujours attendu pour la fin de l’année civile (une ultime hausse étant toujours dans les cartons), la trajectoire future des taux d’intérêts est tout de même révisée en hausse puisque deux baisses seulement (contre quatre auparavant) de taux directeurs sont désormais prévues en 2024 !
Comment expliquer ce revirement de la Fed ? Comme nombre d’économistes, la Banque centrale est probablement surprise de l’extrême résilience de l’économie US à ce qui restera comme une des remontée des taux parmi les plus puissantes et rapides de l’histoire. Celle-ci craint donc qu’un ralentissement insuffisamment marqué ne vienne menacer la trajectoire de désinflation déjà bien enclenchée… Peut-être veut-elle aussi, comme le souligne une analyse de CM-CIC, contrer les effets potentiellement inflationnistes de relances budgétaires déjà actées… Si la Fed a clairement joué la carte de la prudence, celle-ci pourrait tout de même adoucir son discours si la détente observée sur le front de l’emploi venait à se confirmer, et si les prix du logement venaient à suivre la même trajectoire. A suivre…
*Hawkish : un discours restrictif du point de vue de la Banque centrale, qui va de pair avec une politique de taux directeurs élevés.