13 juillet 2023

LES SUCCESSIONS INTERNATIONALES : QUELLES RÈGLES S’APPLIQUENT ?

Le règlement d’une succession internationale est particulièrement complexe dans la mesure où chaque État dispose de sa propre législation, que ce soit en matière civile (partage de la succession) ou en matière fiscale (imposition de la succession). Mais, alors, comment déterminer les règles s’appliquant ?

Sur le plan civil

Pour déterminer la loi applicable, chaque État dispose d’une règle de conflit. Toutefois, les règles de conflit peuvent parfois s’opposer et rendre difficile la détermination de la loi applicable pour le partage des biens.

Par exemple, le Maroc désigne comme loi applicable la loi de la nationalité du défunt, alors que la Thaïlande désigne la loi de la résidence du défunt pour les biens meubles et la loi de l’État de situation pour les immeubles.

L’Union Européenne a quant à elle, simplifié le règlement des successions transfrontalières en unifiant les règles de conflit de ses États membres. En effet, un règlement européen signé par la plupart des États membres (sauf Royaume-Uni, Danemark et Irlande) est entré en vigueur le 17 août 2015. Depuis cette date, tous les pays signataires ont adopté la même règle de conflit qui considère comme applicable à la succession la loi de l’État dans lequel le défunt avait sa résidence habituelle.

En conséquence, les successions au sein de l’Union Européenne sont ainsi plus facilement réglées.

Par exemple, pour la succession d’un Italien résidant en Espagne, les deux États s’accorderont pour désigner comme loi applicable la loi espagnole, pays de résidence habituelle.

Cependant, des conflits de lois perdurent avec les États tiers à l’Union Européenne ou non signataires du règlement.

Le règlement européen a également prévu la possibilité, par acte notarié (appelé Profesio Juris), de désigner de son vivant la loi de sa nationalité comme loi applicable à sa succession. Néanmoins, l’application d’une loi étrangère pourra être limitée par un État membre si elle va à l’encontre de ses lois fondamentales (ordre public), en créant, par exemple, une discrimination fondée sur le sexe ou la religion.

Sur le plan fiscal

Une succession transfrontalière peut théoriquement supporter une triple imposition : dans le pays de résidence du défunt, dans le pays de résidence de l’héritier, dans le pays où sont situés les biens. À noter que chaque État a ses propres règles de territorialité.

Par exemple, pour la France :

  • Si le défunt était résident fiscal français au moment de son décès, la totalité de la succession est imposable en France (1).
  • Si le défunt était résident fiscal hors de France, il convient de regarder la situation de l’héritier :

+ Pour un héritier résident fiscal hors de France, seuls les biens situés en France compris dans sa part d’héritage sont imposables en France (2).

+ Pour un héritier résident fiscal français (et qui l’a été pendant au moins 6 ans au cours des 10 dernières années), la totalité de la part de succession qu’il reçoit est imposable en France (3).

Dans les cas (1) et (3), l’impôt payé à l’étranger peut être imputé sur les droits de succession à payer en France.

En revanche, plusieurs États ont signé des conventions fiscales pour éviter les doubles impositions en matière de succession. Dans ce cas, les dispositions des conventions priment sur les droits internes. Ainsi, le droit d’imposer sera attribué à un État ou l’autre en fonction des catégories d’actifs.

En définitive, l’harmonisation des règles civiles dans l’Union Européenne est un véritable atout, mais des conflits de lois subsistent avec les États tiers et les conventions fiscales relatives aux successions ne sont pas aussi nombreuses qu’en matière d’impôt sur le revenu. Il est donc primordial de bien cerner le traitement applicable à votre succession pour éviter les difficultés et optimiser le partage et le coût.

Christine Correard

Responsable Pôle International ‑ Service Ingénierie Patrimoniale

Lire aussi
 
21 décembre 2023

Quels avantages à optimiser la transmission de son patrimoine avec les donations transgénérationnelles ?

Devant l’allongement de l’espérance de vie, il n’est pas rare d’envisager l’anticipation de la transmission de son patrimoine sur plusieurs générations. Depuis 2006, la donation transgénérationnelle permet au donateur de réaliser un « saut de génération » en gratifiant directement ses petits-enfants, et ce, au détriment de ses enfants qui acceptent de « céder leur place » à la génération suivante.

21 décembre 2023

Donner avant de s'expatrier ou s'expatrier avant de donner ?

Dans un contexte international, les donations peuvent, par principe, être imposables dans l’État où réside le donateur, dans l’État où réside le donataire et dans l’État où est situé l’actif donné. Une imposition multiple est donc possible pour une même donation selon les règles de territorialité des différents États concernés. Mais faut-il donner avant de s’expatrier ou s’expatrier avant de donner ?

21 décembre 2023

Comment anticiper la transmission de son patrimoine ?

Hormis les incidences du régime matrimonial, le coût de la transmission d’un patrimoine varie selon quatre paramètres fondamentaux : le lien de parenté entre le disposant et le ou les gratifiés, la valeur des actifs au jour du décès, leur composition et l’anticipation préparatoire. Le paramétrage de chacune de ces variables vise à contrôler deux points cruciaux : qui hérite et quels seront les droits à payer ; le règlement d’une succession devant intervenir dans les six mois suivant son ouverture.

21 décembre 2023

Comment transmettre des biens immobiliers ?

Très souvent, la question de la transmission d’un bien immobilier se pose dès son acquisition et peut également se poser pendant la détention du bien, puisque les actifs immobiliers sont caractérisés par une détention à long terme. Mais quelles sont les options qui s’offrent au détenteur et comment varient-elles si le bien est détenu directement ou via une société ?

20 décembre 2023

Quelles solutions pour optimiser l’abattement sur les donations ?

Dans le cadre d’une donation, transmettre des placements financiers peut s’avérer très avantageux. Des solutions plus efficaces qu’un simple don en somme d’argent existent, mais lesquelles ?

15 décembre 2023

Quand la Fed nourrit le rallye de noël... ; La BCE plus neutre

Ardemment souhaité par les investisseurs, mais pas nécessairement toujours au rendez-vous, le « rallye de Noël* » semble bien avoir lieu en cette fin d’année 2023. S’il est d’ordinaire de coutume d’utiliser cette expression boursière pour commenter les performances des marchés actions en cette période, le rebond est cette fois ci particulièrement impressionnant sur les marchés obligataires… et pour cause ! Le scénario de désinflation semble s’être accéléré de manière importante depuis la mi-octobre. Surtout, les anticipations optimistes des économistes ont depuis trouvé écho dans les propos des banquiers centraux.