20 décembre 2025

L'économie mondiale à l'aube de 2026 : entre fragmentation et résilience

L'année 2025 aura confirmé l'entrée dans une ère de "conflictualité économique" généralisée. Les tensions ne se limitent plus aux seuls échanges commerciaux : elles touchent désormais les domaines technologique, énergétique, militaire et monétaire. L'indice de fragmentation géopolitique mondiale, qui avait déjà bondi après l'invasion de l'Ukraine en 2022, continue sa progression, témoignant d'une modification profonde de l'ordre économique international établi depuis les années 1990. 

Cette fragmentation se traduit par des réalités économiques tangibles. Les dépenses militaires mondiales ont franchi la barre des 2 % du PIB global, un niveau jamais atteint depuis des décennies. Les pays développés comme émergents réorientent leurs budgets vers la défense et la sécurisation de leurs approvisionnements stratégiques, au détriment parfois des investissements productifs.  

Le poids de l’endettement et la position délicate des banques centrales

Le principal défi structurel auquel font face les économies développées reste leur niveau d'endettement. Les États-Unis, malgré leur statut de première puissance économique, cumulent déficits jumeaux et dette publique croissante, posant la question de la soutenabilité à moyen terme de leurs finances publiques. 

Cette situation place les banques centrales dans une position délicate. D'un côté, le niveau d'endettement exige le maintien de politiques monétaires accommodantes pour éviter une crise de solvabilité des États et des entreprises. De l'autre, les pressions inflationnistes, bien que moins virulentes qu'en 2022-2023, n'ont pas totalement disparu et imposent une certaine vigilance sur les taux directeurs. 

Les anticipations d'inflation à 10 ans restent globalement sous contrôle aux États-Unis, autour de 2,5 %, mais les ajustements de politique monétaire demeurent complexes. En Europe, au contraire, la probabilité d'un retour au "quantitative easing*" augmente, compte tenu des pressions déflationnistes qui pèsent sur la zone euro et de sa croissance atone.  

Les taux d'intérêt réels américains, après avoir connu un pic en 2022-2023, restent relativement élevés autour de 2 % mais les besoins de financement massifs liés aux transitions énergétique, numérique et démographique, combinés au poids de la dette, devraient plaider à moyen terme pour un assouplissement monétaire significatif. 

Les perspectives de croissance mondiale en 2026

Dans ce contexte, la croissance mondiale devrait rester modérée en 2026. La zone euro peine à retrouver son dynamisme d'avant-crise, plombée par des défis structurels (vieillissement démographique, faible productivité, fragmentation politique). Le taux de croissance potentiel européen devrait flirter avec des niveaux proches de 1 %. 

La Chine, malgré un ralentissement progressif lié à ses déséquilibres structurels, demeure un moteur important de la croissance mondiale, notamment pour les pays émergents. 

Une démondialisation partielle et la montée des blocs économiques

L'économie mondiale évolue ainsi vers un régime de croissance plus faible mais également plus fragmentée, où les blocs économiques régionaux prennent une importance croissante. Cette "démondialisation" partielle se traduit par une réorganisation des chaînes de valeur, un raccourcissement des circuits d'approvisionnement et une préférence accrue pour la proximité géographique et politique. 

Les marchés financiers : entre risques et vulnérabilités

Malgré ces fragilités, l'appétit pour le risque des investisseurs reste relativement élevé. Les marchés actions américains, après une année 2025 exceptionnelle avec plus de 20 % de progression du S&P 500, affichent des valorisations tendues mais pas encore dans des zones de bulle caractérisée. 

Le ratio cours/bénéfices du marché américain, bien qu'élevé, ne paraît pas totalement déconnecté des fondamentaux économiques tant que les bénéfices des entreprises continuent de progresser. 

Pour autant, plusieurs indicateurs invitent à la prudence. Les investisseurs restent conscients des vulnérabilités du système : endettement élevé, tensions géopolitiques, risques de correction brutale sur certains segments (notamment la technologie et l'intelligence artificielle). 

Dans un scénario central de croissance modérée avec une légère baisse des taux réels et une stabilisation des tensions géopolitiques, les marchés devraient continuer leur progression. Mais les risques de scénarios alternatifs : récession, nouvelle crise géopolitique majeure, ou au contraire surchauffe inflationniste, demeurent et justifient une approche diversifiée de l'investissement. 

*L’assouplissement quantitatif, ou quantitative easing (QE) en anglais, est un outil de politique monétaire non conventionnelle. Utilisé pour lutter contre le risque de déflation et de récession à partir de 2001 au Japon et de 2010 par la Banque centrale européenne, il consiste, pour une banque centrale, à intervenir de façon massive, généralisée et prolongée sur les marchés financiers en achetant des actifs (notamment des titres de dette publique) aux banques commerciales et à d’autres acteurs. (Site Banque de France) 

La diversification est essentielle pour réduire les risques sans exclure la performance. Pour optimiser la diversification de ses investissements, il est nécessaire d’établir une sélection rigoureuse de placements financiers, avec des caractéristiques différentes qui apporteront chacune leur contribution à la réalisation des objectifs et qui auront un comportement différent selon les périodes. 

Muriel Tailhades Directrice Générale Zenith AM

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